Dominique Perrault Architecture

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1992   |   1999

Vélodrome et Piscine Olympique

Berlin, Allemagne

Jean-François Pousse
«Un monde à part, piscine olympique à Berlin», Techniques & Architecture n°446, janvier 2001.

« La deuxième très grande réalisation de Dominique Perrault après la Bibliothèque nationale de France, emblématique des thèmes déjà remarqués dans ses bâtiments précédents. La première tranche du programme concernait le vélodrome. La seconde, inaugurée en novembre dernier, parachève le complexe sportif berlinois par une série de piscines. Le tout constitue un ensemble à spécificités fortes. Dans la zone est de Berlin, le long d’immeubles tristes et d’une voie de chemin de fer, les deux programmes s’enfouissent dans un socle qui à la fois les masque et les signale. Il ne s’agit pas de disparaître, mais de constituer un autre univers, avec une existence et une logique autonomes. Et d’abord d’installer un écart, une limite à franchir, un passage ici marqué en périphérie du site, par un grand emmarchement blanc, le côté chemin de fer offrant un accès direct en partie souterrain.

Cette frontière passée, se déploie une sorte d’interface urbaine. Du vide. On se souvient en juillet-aout 1989 à propos du projet pour la BNF, de la petite phrase « Une bibliothèque pour la France, une place pour Paris, luxe inouï ». Ici à Berlin, dans le tissu distendu du quartier, s’installe, un peu comme tombé du ciel, un grand champ rectangulaire, plat rigoureusement, mais doux au printemps quand ses 450 pommiers sont en fleurs (quelques-uns sont encore à planter). De ce plateau, la ville est bien visible, mais un peu plus loin, moins présente que le ciel.

La fabrication d’un monde spécifique est à l’œuvre. L’architecture le complète. Du sol de ce monde à part affleurent deux figures géométriques : un cercle (le vélodrome) et un rectangle (la piscine). La limpidité des formes amorce le glissement vers l’abstraction, une étrangeté, une vibration silencieuse, sorte d’au-delà du réel cher à l’architecte.

Pour atteindre les deux équipements, il faut franchir de nouvelles frontières, emprunter de longs pans inclinés qui longent les façades, ou descendre de larges degrés qui s’enfoncent dans l’épaisseur du socle. Comme la BNF, mais aussi à l’usine Applix près de Nantes, au siège d’Usinor Sacilor à Saint-Germain-en-Laye, le thème de l’île, du territoire en retrait s’impose. D’autant que chaque bâtiment – mais peut-on parler de bâtiment ? – est caparaçonné de nappes de métal, ultime limite, énigmatique entablement sous lequel il faut se glisser pour accéder à l’intérieur. Désormais, le visiteur, comme le lecteur de la bibliothèque là-bas à Paris est soustrait à la ville, pris non pas au piège, mais dans les rets d’une architecture autonome. […]

Pour [le vélodrome] et pour les piscines, l’esprit est le même, dans la lignée des réalisations de l’architecte. Objectifs : compter les éléments, condenser, ordonner en quelques grands principes, s’y tenir, obtenir à travers la géométrie et la répétitivité un niveau de concision qui conduise à l’abstraction, au cœur d’un paysage inventé. […]

Si le vélodrome s’enveloppe de couleurs sombres, les piscines jouent de la blondeur du bois, et de la blancheur dans les vestiaires carrelés, aseptisés et troublants comme une énième production de Paul Raynaud. Tendance spartiate, comme aux bureaux de la BNF, rugueux, pauvres sciemment que l’on retrouve au long des accès donnant sur le chemin de fer, mais aussi dans les cotes de maille inox, frustres, industrielles, que le soleil et l’ombre changent en lacs éblouissants ou sombres. »

maîtrise d’ouvrage Ville de Berlin, représentée par OSB Sportstättenbauten GmbH
maîtrise d’oeuvre Dominique Perrault Architecte, Paris ; APP (Architects Perrault & Partners), Berlin et Rolf Reichert, Munich
partenaires APP Architects Perrault and Partners, Rolf Reichert – RPM, SSP - Schmidt, Schicketanz & Partner
bureaux d’études Perrault Projets (ingénierie architecturale), PROMOS projektmanagement Olympiasportstätten (pilote de projet), Ove Arup & Partners Ltd. (structure et fluides), IBUS Institut für Bau, Umwelt und Solartechnik GmbH, IPB Frauenhofer Institut für Bauphysik (physique du bâtiment), Jean-Paul Lamoureux (acoustique et éclairage), Landschaft Planen & Bauen (paysagement), Weidleplan Consulting GmbH, Architekt Kerschkamp (équipement sportif), Éric Jacobsen (ingénieur agronome)
situation Landsberger Allee, Berlin, Allemagne
superficie du site 10 ha
surface construite 53 780 m² (vélodrome : 29 800 m², piscine : 23 980 m²)
volume construit 809 816 m³ (vélodrome : 452 701 m³, piscine : 357 115 m³)
aménagements paysagers verger planté de 450 pommiers
aménagements urbains aménagement quais de la gare du S-Bahn (RER) qui dessert le site
début des études d’exécution 1992
début des travaux vélodrome juin 1993 piscine: juin 1995
durée des travaux 4 ans et 3 mois piscine: 4 ans et 5 mois

programme
Vélodrome polyvalent (29 800 m²) : cyclisme, athlétisme, tennis, hippisme, éducation sportive, concert (11 420 spectateurs, 5 583 place assises) ; piscine (23 980 m²) : 2 bassins olympiques, plongeoir olympique, bassins d’entraînement au plongeon, pour handicapés, pour enfants (4200 spectateurs, 2 136 places assises) ; salle multi sports.
Vélodrome et Piscine Olympique